L’hôtel Flachat

Cet hôtel nous rappelle l'existence sur la ville de la famille Flachat. Son plus illustre membre, Jean-Claude Flachat, introduit en France de nouvelles techniques de teinture (rouge d'Andrinople), et la technique de l’arçonnage du coton.

Architecture

L’Hôtel Flachat semble construit au cours du XVIIIème siècle. Sa lecture est néanmoins difficile car sa façade est modifiée au XIXème siècle lors de l’alignement de la Route Royale N°88. Cet alignement (1831) entraîne la reconstruction de plusieurs façades de la rue.

La façade de l’hôtel reprend les éléments de l’architecture néo-classique avec une sobriété des formes, un traitement de la pierre en bossage et des baies en plein cintre en rez-de-chaussée. Dans la cour, un ancien linteau en accolade (faux-arc) porte le dessin d’une navette et la date de 1575. Cet indice historique soutient l’hypothèse que ce bâtiment abritait sans doute des activités liées à la soie depuis le XVIème siècle.

Jean-Claude Flachat et ses voyages

Jean-Claude Flachat est né le 3 août 1718 au Regard, un petit hameau de Saint-Jean-Bonnefonds. Son père, Claude Flachat, est maître passementier puis marchand de rubans. La famille s’installe à Saint-Chamond en 1719.

Issu d’une famille de maîtres-passementiers fortunée, il bénéficie d’une éducation et d’une situation favorable lui permettant d’entreprendre de nombreux voyages dès son plus jeune âge. En 1737, il voyage à Bucarest où il se forme à la chimie grâce à l’acquisition d’une bibliothèque et devient peu à peu un chimiste connu dans tout le pays. En 1740, il se rend à Constantinople où il s’installe pendant quinze ans et obtient la protection directe d’un grand fonctionnaire impérial, le Kislar Aga. Celui-ci nomme Flachat chef de la guilde des marchands de la ville. Sa position et sa curiosité vont lui permettre d’étudier les techniques employées dans l’artisanat du coton et de la soie, de l’arçonnage et de la teinture.

En 1756, il revient à Saint-Chamond auprès de sa famille et met en application les connaissances acquises lors de ses voyages. A cette occasion, l’entreprise de son frère Jean-François Flachat avec qui il s’associe, va recevoir le 21 décembre 1756, par arrêt du Conseil du roi, le titre de Manufacture Royale de Saint-Chamond de teinture. Lors de son voyage retour, de nombreux ouvriers qualifiés l’accompagnent : des teinturiers d’Andrinople qui apportent le Rouge d’Andrinople, des fileurs persans, des arçonneurs de Smyrne et des Arméniens avec leur Bleu de Chypre (dérivé du vitriol). Ces étrangers vont transmettre leur savoir-faire aux ouvriers français et permettre le développement rapide de la manufacture.

Chargé d’une mission en Orient par Daniel Trudaine, économiste du gouvernement de Louis XV, Flachat va ensuite repartir pour mener des observations afin d’améliorer les infrastructures du royaume. Ses observations sont publiées dans un ouvrage en deux volumes en 1766 intitulé Observations sur le commerce et sur les arts d’une partie de l’Europe, de l’Asie, de l’Afrique et même des Indes Orientales.

Malgré tout, l’entreprise de Flachat ne survit pas à la concurrence. La manufacture ferme en 1770. Flachat écrit alors : “Ma manufacture a servi d’exemple et de nourrice à d’autres. Celles-ci ont prospéré, la mienne a été négligée et, d’un jour à l’autre, je me vois enlever ou mes ouvriers, ou mes pratiques”.

Le 31 juillet 1775, n’ayant n’obtenu ni lettres de noblesse, ni de reconnaissance royale, il meurt ruiné. Son petit-fils Christophe Eugène Flachat (né en 1802), sera un ingénieur français qui concevra la première ligne chemin de fer française spécialement dédiée aux voyageurs : la ligne Paris / Saint-Germain-en-Laye.

Voyager au XVIIIème siècle

Au XVIIIème siècle se développe le tourisme aristocratique. Il était alors coutume pour les jeunes aristocrates britanniques d’effectuer un “Grand Tour”, un voyage à travers l’Europe pour leur permettre de découvrir le monde et de nouer des relations avec des personnalités importantes. Cette pratique se diffuse largement à travers la France. Fort de cette nouvelle génération, on assiste peu à peu au développement du voyage d’exploration scientifique. Les expéditions en Orient se multiplient alors dès le milieu du XVIIIème siècle. Ces voyages vont avoir pour objectif l’étude des pays étrangers, de leur faune, de leur flore, de leurs pratiques et coutumes. Il s’agit de satisfaire un besoin grandissant pour le savoir anthropologique mais aussi pour rapporter sur le territoire des techniques ancestrales. Dans la région, la soie lyonnaise est née de ces importations.

Au XVIIIème siècle, le voyage se fait par bateau mais surtout par voie terrestre (dans des carosses, chaises de poste ou diligences). Un carosse peut parcourir de 8 à 10 lieues (40 km) par jour, tandis qu’une diligence parcourt environ 20 lieues par jour (80 km). L’apparition du chemin de fer au début du XIXème siècle réduira fortement ces distances.